La chute au Théâtre Des Mathurins

affiche-la-chute

Artiste : 

Ivan Morane

A l’affiche :

Jusqu’au 29 juin 2019

Lieu :

Théâtre des Mathurins

38, rue des Mathurins

750008 PARIS

Réservation en ligne
Réservation en ligne
la-chute

Par Marie-Christine pour Carré Or TV

Un bel hommage à Albert Camus

 

Ivan Morane, metteur en scène et comédien campe au Théâtre des Mathurins le personnage de Jean -Baptiste Clamence : Juge pénitent dans la pièce d’Albert Camus : La Chute.

Seul en scène, en exil à Amsterdam, cet ex avocat devenu juge pénitent, sorte d’ermite, petit prophète, se livre à une confession sous la forme d’un soliloque, avec un interlocuteur muet.

Il faut tout le talent d’Ivan Morane pour incarner ce personnage sombre, dérangeant, inquiétant et faire vivre également cet « autre », à qui il livre son passé, son présent tout en faisant le procès de l’humanité.

Au temps de sa gloire, il était un avocat renommé à Paris, voué aux « nobles causes ». Un homme à priori irréprochable, du moins dans sa vie professionnelle, avec ce besoin d’être toujours au dessus !Au dessus même des juges !

«  On aurait cru vraiment que la justice couchait avec moi tous les soirs3 « Moitié Cerdan, moitié de Gaulle ». Dans ce bar louche d’Amsterdam, il livre à cet inconnu, sa vie passée, l’innocence de sa jeunesse, tout en jugeant les faiblesses de l’homme.

Ainsi défend-il que toute bonne action ne se justifie que par le besoin de l’homme de s’aimer avant tout !

La charité, les bonnes actions cachent l’égocentrisme du genre humain.

Jusqu’au jour où Clamence entend un rire, venant de nulle part et terriblement angoissant.

La chute » a été adaptée au théâtre, en 5 scènes, avec une mise en scène exigeant la sobriété où l’homme face à lui même se regarde dans le miroir tendu par le juge pénitent.

Sur scène, un fauteuil se transformant au fil de la narration en lit et une bouteille.

Brouillard artificiel, seul artifice technique pour recréer l’atmosphère glauque du port d’Amsterdam, et l’ambiance de ce bar mal famé : « Mexico city » où le narrateur passe le plus clair de son temps. Un jeu de lumières parfaitement maîtrisé par Ivan Morane également.

Ce juge pénitent est habillé en noir : Costume cravate avec un long imperméable sombre également.

Clamence : Confesseur et accusateur est un être inquiétant pour nous tous, En dénonçant les travers de l’humanité, il nous donne mauvaise conscience, nous culpabilise.

« Chaque homme a besoin d’esclaves comme d’air pur ». Tous coupables et tous juges !

Mettant en avant la mauvaise foi, la fornication, l’orgueil, la jalousie, l’obsession du jugement… Nous éprouvons une sorte de dégoût. La culpabilité devient un véritable leitmotiv à compter de son acte de lâcheté.

Ne pas avoir porté secours à une femme qui s’est jetée dans la Seine, alors qu’il était proche d’elle et être rentré chez lui sans prévenir personne !

Clamence va émigrer en Hollande et installer son bureau d’avocat à « Mexico City », tenu selon ses dires par un chimpanzé, mais ces primates ont le mérite de ne pas avoir d’arrière-pensées !

Il tente d’oublier ce rire qui le hante et réaffirme haut et fort que l’homme n’est pas innocent, qu’il faut le traiter en coupable.

Cette pièce de Camus est évidemment profondément dérangeante, elle mélange des vérités et des mensonges, elle brouille les pistes.

Nous éprouvons un sentiment de malaise, d’interrogations.

« La liberté est une corvée, une course de fond, bien solitaire, bien exténuante. »

Vous quittez le théâtre avec une foule de questionnements. Ces interrogations face à la chrétienté ? A la place de Dieu ?

Le satanisme vertueux des auteurs ?

Jusqu’à la dernière phrase de cette pièce, vous demeurez dans le doute.

« Il est trop tard maintenant, il sera toujours trop tard. »

Vous ne sortez pas indemnes de cette pièce.

Il faut louer évidement l’immense talent d’Ivan Morane, incroyablement expressif. D’une diction parfaite, tour à tour lyrique, sarcastique, gouailleur. Ce comédien habite incontestablement ce personnage de Juge pénitent.

3 plusieurs commentaires

  1. Très belle adaptation de ce roman intense. Et magnifique prestation de Yvan Morane, je recommande !

  2. Malgré l’absence du technicien chargé de la mise en lumière et du son, Yvan Morane a su nous entraîner « a cappella » dans les tréfonds de l’ âme de l’avocat torturé qu’il incarne, ménageant un crescendo dramatique assez extraordinaire! Du grand art pour un grand Camus. A voir absolument!!!!

  3. Amoureux de beaux et de grands auteurs celui-ci est un de mes préférés, dommage qu’il ne soit pas plus joué. Je me rappelle d’avoir vu un « Etranger » exceptionnel dans un petit théâtre près de Bastille avec 4 comédiens.Ici Jean Morane est formidable. Il nous entraîne malgré nous dans la chute inévitable de son talent.

Laisser une réponse

Votre adresse email ne sera pas publiéeLes champs requis sont surlignés *

*