« La Valise » de Sophie Forte au Théâtre Essaïon

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Par Stanislas pour Carré Or TV

Un seul en scène drôle, émouvant

et profondément humain

 

Parfois, il suffit d’un simple objet pour déclencher une odyssée intime et théâtrale. Dans La Valise, son nouveau spectacle joué au Théâtre Essaïon, Sophie Forte transforme un héritage modeste — une vieille valise pleine de photos familiales — en un trésor scénique de souvenirs, d’émotions et de rires. Avec ce seul en scène tour à tour hilarant, bouleversant et profondément authentique, l’artiste signe un hommage vibrant à sa famille, et tout particulièrement à son père, « peintre malgré lui ».

 

Une valise pleine de vie

 

Tout commence par un décès. Celui d’un oncle, André. Un départ qui laisse derrière lui une valise, témoin silencieux de plusieurs générations. En l’ouvrant, Sophie Forte découvre des centaines de photos retraçant l’histoire de sa famille, des arrière-grands-parents italiens jusqu’à ses propres enfants. À partir de ces images figées, elle tisse sur scène une fresque familiale pleine de couleurs, de drames, d’excentricités, et surtout d’amour.

Avec une virtuosité rare, Sophie incarne tous les membres de cette tribu : un père casanier devenu peintre international sans jamais quitter son canapé, une mère exubérante, une tante extravagante aux brushings inimitables, un grand-père napolitain aussi dangereux qu’attachant, un oncle à la destinée aussi inattendue que touchante, et même… un chien immortel nommé Gerry. Chaque personnage surgit comme un souvenir qu’on croyait oublié, et prend vie avec tendresse et panache.

 

Un récit personnel à portée universelle

 

Ce spectacle est une adaptation théâtrale du roman éponyme de Sophie Forte, La Valise. Ce qui aurait pu n’être qu’un exercice de nostalgie devient ici une véritable performance d’actrice, oscillant avec brio entre comédie et émotion. Elle fait rire, bien sûr — c’est Sophie Forte, après tout — mais elle émeut aussi, souvent, à la lisière des larmes.

Ce qui frappe, c’est l’universalité du propos. Chacun peut retrouver dans cette galerie de personnages un membre de sa propre famille, une anecdote enfouie, une bizarrerie familière. On pense à nos propres albums photos, à ces visages que l’on ne veut pas laisser s’effacer. Et c’est là que La Valise devient plus qu’un spectacle : un acte de mémoire, une célébration de nos racines.

 

Une artiste complète et lumineuse

 

La force du spectacle repose évidemment sur la personnalité singulière de Sophie Forte, que le public suit depuis des décennies avec une fidélité réjouissante. Artiste protéiforme — comédienne, chanteuse, auteure, metteuse en scène — elle possède cette capacité rare à captiver sans artifice. Chaque intonation, chaque mouvement sur scène traduit son amour du théâtre et son besoin sincère de transmission.

Formée aux cours Simon, révélée par La Classe puis Rien à cirer sur France Inter, collaboratrice de Michel Drucker et Christine Bravo, elle a exploré toutes les facettes de la scène. Des cabarets à la comédie, en passant par la chanson et la littérature jeunesse, Sophie Forte a toujours suivi le fil de sa sensibilité, avec une fidélité touchante à elle-même. La Valise, qu’elle a créée au Festival d’Avignon 2023, s’inscrit dans cette continuité : une œuvre personnelle, portée avec une sincérité désarmante.

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Une performance en constante évolution

 

Si certains spectateurs l’avaient découverte à Avignon — dans une version raccourcie du spectacle, contrainte par le rythme intense du festival — ils retrouveront au Théâtre Essaïon une version peaufinée, enrichie et plus fluide. Les transitions sont désormais plus abouties, la mise en scène plus lisible, et l’émotion, plus intense. On sent que Sophie Forte a laissé mûrir sa valise, et le contenu n’en est que plus savoureux.

Le charme opère dès les premières minutes. Son talent de conteuse emporte immédiatement. Elle passe d’un personnage à l’autre avec un naturel confondant, sans jamais tomber dans la caricature. Et derrière l’humour, parfois ravageur, se dessine une pudeur, une fragilité aussi. Comme si, en nous parlant de sa famille, elle nous faisait aussi cadeau d’une part d’elle-même.

 

Un spectacle à ne pas manquer

 

La Valise est de ces spectacles rares qui vous font sourire pendant 1h15, puis vous poursuivent longtemps après la tombée du rideau. Parce qu’ils parlent de ce qui nous constitue tous : la mémoire, les liens, les absents qui continuent de nous accompagner. C’est un spectacle chaleureux, humain, profondément joyeux — même dans ses passages les plus mélancoliques.

Au moment où le monde semble parfois perdu dans le bruit et la vitesse, ce type de rendez-vous théâtral fait un bien fou. On en sort le cœur léger, l’âme apaisée et les yeux un peu brillants. Et surtout, on a envie de rentrer chez soi, d’ouvrir à notre tour nos tiroirs à souvenirs, de raconter nos histoires à nos enfants, à nos amis, avant qu’elles ne s’effacent.

Alors ne tardez pas : prenez vos places, ouvrez La Valise avec Sophie Forte au Théâtre Essaïon. Vous y trouverez une bonne dose de tendresse, beaucoup de rires, et peut-être un morceau de votre propre histoire.

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