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Par Stanislas pour Carré Or TV
Une pièce qui défie le temps et l’amour
Le Théâtre Darius Milhau accueille jusqu’au 27 novembre 2025 une pièce aussi poétique qu’intrigante : Constellations, de l’auteur britannique Nick Payne, mise en scène et interprétée par Charlotte Jorno, aux côtés de Eliott Guenoden. Un spectacle sensible et bouleversant qui explore les infinies variations d’une histoire d’amour à travers la théorie des univers parallèles.
Une rencontre sous le signe du hasard et de l’infini
« Et si tout ce que nous vivons n’était qu’une version parmi d’autres ? Et si, à chaque choix, une autre réalité prenait forme ? » Telle est la question vertigineuse au cœur de Constellations.
La pièce débute par une rencontre en apparence ordinaire : Marianne, astrophysicienne, croise le chemin de Roland, apiculteur. Leur histoire d’amour pourrait être simple, mais elle se déploie selon une mécanique subtile : chaque scène se répète, diffère légèrement, bifurque vers un autre possible. Une phrase dite autrement, un geste esquissé ou retenu, et le destin prend une nouvelle direction.
Nick Payne signe ici un texte d’une grande modernité, récompensé à plusieurs reprises outre-Manche. Il interroge les notions de destin, de hasard et de libre arbitre, tout en confrontant les spectateurs à la fragilité du temps et à la beauté éphémère de l’existence.
Une mise en scène fluide et lumineuse
La mise en scène de Charlotte Jorno épouse parfaitement la dimension multiple du texte. Épurée, presque minimaliste, elle met l’accent sur la justesse émotionnelle plutôt que sur le décor.
Quelques jeux d’ombres, une lumière changeante, et tout bascule : la salle devient un espace quantique où les univers se superposent. L’alternance entre humour et gravité, entre la légèreté des débuts amoureux et la dureté de la maladie, est maîtrisée avec finesse.
Le public, happé dès les premières minutes, suit les personnages à travers ces réalités mouvantes sans jamais se perdre. Charlotte Jorno réussit le pari de faire sentir la répétition sans la monotonie, grâce à un rythme précis et une direction d’acteurs tout en nuances.
Un duo d’acteurs captivant
Sur scène, Charlotte Jorno et Eliott Guenoden forment un couple d’une intensité rare. Leur complicité est palpable, leur jeu organique.
Lui, tout en retenue, incarne la simplicité et la tendresse ; elle, plus vive et cérébrale, traduit avec justesse la complexité d’un esprit scientifique confronté à l’imprévisible des émotions. Ensemble, ils donnent vie à des dizaines de possibles : amour fou, rupture brutale, maladie, retrouvailles… Leurs échanges, parfois anodins, deviennent bouleversants par la répétition et la variation.
Un spectateur confie sur BilletRéduc : « Le travail de Charlotte sur la mise en scène est superbe, surtout avec les jeux d’ombres. Les deux comédiens sont top. » Un autre ajoute : « On rit, on pleure, on réfléchit. C’est une expérience complète. »
Un théâtre intime pour un voyage intérieur
Le Théâtre Darius Milhaud, avec sa salle intimiste de 100 places, se prête merveilleusement bien à cette pièce introspective. Le spectateur n’est pas un simple observateur : il se sent impliqué dans l’expérience, comme s’il participait lui aussi à ce grand jeu cosmique où chaque choix ouvre une autre trajectoire de vie.
Pendant 1 h 20, le temps semble suspendu. L’absence de décor fixe renforce l’universalité du propos : nous pourrions tous être Marianne et Roland, hésitant entre plusieurs routes, incapables de savoir laquelle était la bonne.
Quand la science rencontre le sentiment
L’une des grandes forces de Constellations réside dans la fusion entre science et émotion. Marianne parle d’astrophysique, de multivers et de mécanique quantique ; Roland, lui, évoque ses abeilles et la douceur du miel. Ces deux univers, que tout semble opposer, finissent par se répondre : la rigueur scientifique face à la spontanéité du cœur. La pièce montre avec délicatesse comment amour et destin s’entrelacent, parfois au-delà de notre compréhension rationnelle.
Un texte qui questionne et bouleverse
Constellations n’est pas une histoire d’amour comme les autres. C’est une expérience de pensée, un miroir de nos propres hésitations. Qui ne s’est jamais demandé : « Et si j’avais dit oui ? Et si j’avais osé partir ? »
Le texte de Payne offre autant de réponses qu’il pose de questions. Il nous rappelle que chaque mot, chaque geste, chaque silence a le pouvoir de tout changer.
Un spectacle à ne pas manquer
Dans une époque où tout va vite, Constellations nous invite à ralentir et à contempler nos propres trajectoires. C’est une pièce qui parle d’amour, de mort, de hasard, mais surtout de la beauté fragile des instants vécus.
On ressort ému, songeur, un peu différent. Peut-être avec la conviction qu’il n’y a pas une seule vie possible, mais une infinité de chemins qui coexistent en nous.
À travers sa mise en scène sobre et ses deux comédiens habités, Constellations s’impose comme l’un des spectacles les plus sensibles et intelligents de la saison. Un bijou d’émotion et de réflexion à découvrir au Théâtre Darius Milhaud, avant que les étoiles ne s’éteignent.