Coups de coeur

Zola l’infréquentable au Théâtre de la Contrescarpe

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Par Marie-Christine pour Carré Or TV

Une belle leçon d’histoire

 

On peut avoir une belle amitié́ avec le père mais ne pas forcement la partager avec sa progéniture !

Voyez Emile Zola et l’illustre auteur « des Lettres de mon Moulin », tous deux unit par une belle et franche amitié́, or avec le fils de ce dernier : Léon Daudet, l’inimitié́ était totale et le mot est faible !

Didier Caron, comédien et auteur de pièces de théâtre, présente à la Contrescarpe « L’infréquentable Zola » dont il assure également la mise en scène.

Pierre Azéma campe le personnage d’Émile Zola avec un réalisme troublant.

L’auteur de Thérèse Raquin, de la série des Rougon Macquart comptant pas moins de 20 livres est âgé de 55 ans au moment de l’Affaire Dreyfus.  Procès qui oppose les Français de 1895, en 2 camps irréconciliables : Les Français dont le cœur penche à gauche sont en principe dreyfusards et les Français de droite et d’extrême droite farouchement antisémite sont quant à eux anti-dreyfusards.

Zola jusqu’à cette Affaire, n’a jamais exprimé́ vraiment en public sa couleur politique et n’adhère à aucun parti, même si au travers de son œuvre, il met en scène dans la plupart de ses livres, des hommes et des femmes de l’ombre : Des mineurs, des grisettes, des vendeuses… Il se contente d’être un écrivain, mais la droite française et en particulier la gente intellectuelle ne le reconnait pas comme l’un des siens et lui refuse systématiquement l’accès à l’Académie Française.

Face à lui, Léon Daudet interprété́ par l’excellent comédien Bruno Paviot, perfide à souhait, pousse Zola dans ses retranchements. Homme politique, membre de l’Action française, journaliste au Figaro, pamphlétaire, écrivain très prolifique, il n’aura néanmoins jamais le talent littéraire de son père.

Nationaliste et clérical, activiste et antisémite dès ses études.

Malgré́ la haine profonde qu’il voue à Zola, le surnommant « Le grand fécal », il respecte les dernières volontés de son père et demande au Père des Rougon Macquart de faire l’éloge funèbre d’Alphonse Daudet.

Cette pièce écrite magistralement par Didier Caron met en scène 2 personnages haut en couleur et nous assistons pour notre plus grand plaisir à une véritable joute verbale.

L’action se déroule successivement dans le salon des Daudets, Zola ramasse un journal plie, de droite bien évidemment ! Avec en 1ère page, un article peu élogieux d’Anatole France à son égard.

Léon Daudet, fondateur de l’Action française avec Charles Maurras, réactionnaire au dernier degré́ se livre à des attaques frontales d’une violence inouïe envers Émile Zola : « Votre fond d’écriture est sommaire et bâclé́ ».  Zola face aux injures répétées se défend : « Vous ne restez qu’un pamphlétaire, ferré à l’injure dans laquelle vous excellez ; c’est vous qui êtes un bourbier… bourbier de mots, de pensées, bourbier de vie ».

Léon Daudet grand duelliste essaie d’atteindre Zola sur tous les plans : Sa vie familiale, son épouse Alexandrine, sa maîtresse Jeanne, ses enfants, ses livres et ses amis… C’est le type même du provocateur.

La fresque historique de Didier Caron s’étend de 1895 : Date du procès Dreyfus à 1902 mort de Zola.

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L’action se poursuit dans le cabinet de travail d ‘Émile Zola puis dans le bureau de Léon Daudet. Ce dernier veut absolument que Zola prenne connaissance de l’article qu’il va publier dans le Figaro au sujet de l’affaire Dreyfus.

Toutes ces ignominies lancées par la droite antisémite est insupportable, ce procès insensé́ et cette sentence injuste, cette haine grandissante envers les juifs, cette atmosphère devenue délétère. Emile Zola ne peut rester silencieux, il doit se manifester et faire éclater la Vérité́.

Il faut que le procès contre Dreyfus soit révisé́, il n’est pas tolérable qu’un innocent paie pour un acte qu’il n’a pas commis. Zola croit en son âme et conscience à l’innocence du Capitaine Dreyfus.

Avec « J’accuse » » paru dans « L’Aurore » le 13 Janvier 1898 et une lettre à Félix Faure, Président de la République. Le journal s’arrache dans les rues de Paris en quelques heures à 300 000 exemplaires !

Zola s’attaque sans détour aux hautes autorités de l’Armée française, à la justice. « Ma protestation enflammée », n’est que le cri de mon âme ».

Condamné, Émile Zola se refugie durant 11 mois à Londres. La suite nous la connaissons.

La cause de sa mort demeure également un mystère, même à ce jour.

Cette pièce « L’infréquentable Zola » est interprétée de manière absolument magistrale par deux très grands comédiens : Pierre Azéma et Bruno Paviot. Le premier a déjà̀ joué dans d’autres pièces de Didier Caron. On se rappelle de sa prestation dans « Fausse note » avec Pierre Deny dans ce même théâtre de la Contrescarpe.

Son ennemi juré dans la pièce : Léon Daudet est servi par l’excellent Bruno Paviot.

Nous avons pu l’applaudir dans : « Les nombrils » « Un pavé dans la cour » pièces de Didier Caron.

Durant 1h25 les répliques fusent à vitesse grand V, les comédiens font revivre avec une grande vérité́ l’Affaire Dreyfus et l’atmosphère de la France de la fin du 19ème siècle.

Zola est vraiment une personnalité́ hautement fréquentable, la preuve en 1908 sa dépouille fut transportée au Panthéon !  « Aux grands Hommes, la Patrie reconnaissante ».

Léon Daudet a été enterré à St Rémy de Provence et sa tombe est aujourd’hui quasiment à l’abandon.

« Zola l’infréquentable » à voir absolument au Théâtre de la Contrescarpe.

Extrait vidéo

Un commentaire

  1. merci infinimentt pour ces mots élogieux et touchants.

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