Le cas de Martin Piche au Théâtre Montparnasse

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Distribution : 

Jacques Mougenot, Hervé Devolder

A l’affiche : 

Jusqu’au 4 juin 2017

Lieu : 

Théâtre Montparnasse

31, rue de la Gaité

75014 PARIS

Comparez les prix : 

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Par Ingmar Bergmann pour Carré Or TV

Le pire n’est jamais sûr,

même pour ceux qui s’ennuient !

 

Nous sommes au Théâtre Montparnasse, afin d’assister à la création du spectacle « Le cas Martin Piche ».

La scénographie, très réaliste et très conventionnelle, de cette production soignée, figure le bureau d’un psychiatre, qui se prépare à recevoir Martin Piche, un nouveau patient qui vient pour se faire soigner d’un mal étrange et peu étudié : l’ennui. L’ennui de soi, l’ennui des autres, l’ennui des autres pour soi, l’ennui de l’ennui, l’ennui du non-ennui : toutes les formes de l’ennui sont évoquées, des moins ennuyeuses aux plus ennuyeuses, y compris les formes absurdes du possible désennui car, dans cette pièce, la distraction et le divertissement sont envisagés comme autant de viatiques dérisoires et pathétiques et, par conséquent : forcément ennuyeux, eux-aussi.

On pense immédiatement à la nature excessive du théâtre dit « de l’Absurde » ou, plutôt, et pour se conformer à la pensée d’Eugène Ionesco qui en est son plus emblématique représentant, du théâtre « de l’Insolite » car il y a, dans ce dernier terme, un caractère d’effroi et d’émerveillement face à l’étrangeté du monde, alors que « l’absurde » serait synonyme de non-sens ou d’incompréhension, même si, après tant d’années d’ennui, chez Martin Piche, force est de constater que l’effroi et l’émerveillement sont complètement émoussés et qu’ils ont, finalement, cédé leur place à l’apathie, parfaitement délétère. La combinaison de l’effroi et de l’émerveillement décrirait plutôt l’attitude de son thérapeute.

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Martin Piche est un monsieur d’un âge certain, qui s’ennuie de façon quasi-professionnelle depuis qu’il est venu au monde, avec une constance presque zélée mais sans passion aucune, comme un « bon employé » : appliqué, docile et sans ambitions. Pourtant, ce qui peut paraître une posture, au premier abord, nous touche très rapidement car, dans notre société, qui n’a jamais été confronté à la vacuité, voire : à la vanité de son existence, quand ce n’est pas, même : au sentiment, tragique, de son inutilité ? Une situation absolument intolérable, à notre époque où l’inutile est un crime…

On pense d’abord qu’il s’agit de coquetterie ; et il est vrai que cette coquetterie est en chacun de nous, qui aimons sentir à quel point la marche du monde ou, du moins, la marche de notre monde est tributaire de nos actions ; mais, le plus souvent, le lâcher-prise et l’acceptation de ce lâcher-prise, qui nous forcent à accepter que nous sommes presque toujours le jouet d’un courant qui nous transporte, nous sont généralement insupportables, car notre culture occidentale a la réputation de nous inciter surtout au volontarisme ou, lorsque l’on n’en est pas ou plus capable : au mouvement. Pour cette raison, on se persuade, très tôt, que l’on doit absolument trouver une « raison d’être » à notre existence et, lorsque l’on n’est pas en situation d’être génial, par exemple, lorsque les circonstances n’ont rien d’exceptionnel, ne parvenant pas à orienter notre vie d’une manière transcendante, on choisit la démission. « Le cas Martin Piche » est-il une illustration, inconsciente et doucement violente, de ce que les spécialistes appellent, depuis les recherches de Martin Seligman, en 1975 : « l’impuissance acquise » ?

Le personnage de Martin Piche est un démissionnaire, mais qui a, tout de même, des scrupules à démissionner totalement, puisqu’il décide de se faire « soigner », afin de complaire à sa femme, qui ne supporte plus cette situation et menace de le quitter pour cette raison, signe paradoxal que Martin Piche n’est pas totalement insensible à la réalité de son état, puisqu’il se rend bien compte que sa situation pourrait encore empirer ; et son cas passionne son thérapeute, qui pense alors être devant une situation inusitée, qui pourrait lui donner l’occasion de briller devant ses pairs, et qui met au défit le spécialiste, en lui, car, bien qu’il ne soit pas aussi atteint ni, à cet égard, aussi sensible que son patient, il évolue aussi dans une routine, même s’il semble la trouver confortable…

Jacques Mougenot, qui est aussi l’auteur de la pièce, est un thérapeute tout à fait convaincant qui, en scientifique accompli, s’acharne à vouloir comprendre et, ce faisant, exprime notre inquiétude, face au monde, et notre incompréhension de spectateurs. De même, Hervé Devolder, qui est aussi le metteur en scène de la pièce, nous offre de grands moments de candeur désopilante, qui pourrait aussi être la nôtre car, si l’on peut ressortir de ce spectacle en ayant l’impression d’être parfaitement démunis, c’est après avoir connu des moments d’une grande légèreté qui nous auront fait beaucoup rire de nous-même et, aussi, de notre siècle car, avant la fin, nous aurons été gratifiés d’un surprenant « coup de théâtre »…

Extrait vidéo :

3 plusieurs commentaires

  1. Pièce qui ne vous laisse pas un moment de répit entre rire, réflexion,finesse, un dénouement totalement inattendu. Enfin tout sauf de l’ennui! A voir absolument

  2. C’est fin, c’est intelligent, c’est malin, c’est très drôle, c’est une pièce à ne pas manquer !

  3. Il est des pièces insoupçonnées, des pépites qui donnent envie de retourner au théâtre. « Le cas Martin Piche » est de celles-ci : drôle, très drôle même, fine, très fine même, bien jouée, très bien jouée même !! Un régal théâtral qui ne vous laissera aucun répit et ce jusqu’à la dernière minute !! Mon conseil = foncez-y !!

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